Cap sur Trégunc, plus précisément au lieu-dit de Coat-Kergunus, sur l’exploitation laitière de Louis et Liliane Dagorn. Les bâtiments ne sont pas visibles depuis la route, si bien que l’on peut facilement passer devant le sentier sans s’en apercevoir. Je finis par m’engager sur le chemin rendu boueux par la fine pluie tombée sans discontinuer depuis le matin. La maison des Dagorn se confond avec les hangars agricoles, complètement intégrée au sein du corps de bâtiments. Je frappe discrètement à une porte vitrée donnant sur la pièce à vivre. Louis vient m’ouvrir. Je déballe mon matériel, l’entretien commence.
Louis me raconte tout d’abord son parcours d’installation. Après avoir fait des études d’ingénieurs, Liliane et lui décident de s’installer en 1979. Ils partagent alors l’exploitation avec les parents de Louis, mais ne travaillent pas directement sur le siège de l’exploitation. Ils partent donc de zéro, achètent la première clé à molette, commencent à cultiver leurs 20 ha de terres et constituent eux-mêmes leur troupeau de vaches laitières qu’ils ramènent d’Angleterre. Tout au long de leur carrière, les Dagorn ont pu observer et s’adapter aux évolutions du monde agricole en améliorant leur système. Ni bio, ni conventionnel, « ici, on est entre les deux », posant ainsi la question de la pertinence d’opposer ces deux systèmes de production. Liliane et Louis se sont toujours impliqués localement dans les dynamiques du territoire, en assistant notamment aux réunions du bassin versant en tant que membres du GAR (Groupement d’Agriculteurs Référents), ou en participant activement aux échanges et aux réflexions au sein du groupe écophyto. Leur engagement s’exprime également dans leur volonté d’accueillir des stagiaires sur leur ferme pour les former, ainsi que dans leur implication au sein du conseil d’administration du lycée agricole de Bréhoulou à Fouesnant. Aujourd’hui, Louis part à la retraite, bientôt suivi par Liliane. Son fils, qui s’est installé au début des années 2000, et a pris part active dans les activités de la ferme à partir de ce moment, va maintenant reprendre la suite, avec l’aide de deux salariés temps-plein.
Quand Louis et Liliane s’installent, ils possèdent 20 ha et une vingtaine de personnes travaillent sur les parcelles alentour. Petit à petit, l’exploitation s’agrandit avec la location et l’achat des terres voisines. Aujourd’hui, elle compte environ 200 ha, et trois personnes à temps plein suffisent à la faire tourner. Autre évolution, Louis remarque qu’il y a de moins en moins de couples à la tête d’exploitations. Pour assurer un salaire fixe, l’un des conjoints travaille en effet souvent en dehors de la ferme. Le recours à des salariés agricoles, des entreprises ou des CUMA est de plus en plus fréquent.
Sur le territoire fouesnantais, Louis observe des types de production qui restent encore relativement variés, avec peu d’outils de production industriels. L’élevage laitier y est dominant, mais les structures restent de tailles modestes en comparaison avec d’autres secteurs géographiques. Il relève également l’installation de jeunes – souvent non-originaires du milieu agricole – en maraichage ou autres productions dites de niche (plantes aromatiques, produits transformés, etc.).
Lorsque je lui pose la question de savoir si l’on peut parler d’agriculture littorale sur le secteur de Trégunc, Louis reconnait que les conditions climatiques et les caractéristiques du sol sont différentes ici par rapport à l’intérieur des terres. Mais il y a encore autre chose : « l’agriculture littorale elle est différente en ce sens qu’elle a abandonné les productions hors-sols qui font peur quoi. Du fait de l’attrait touristique du littoral. » L’activité touristique et l’urbanisation croissante de la zone côtière ont ainsi eu, et continuent d’avoir, des implications sur les types de production présents sur le territoire.
Vous pouvez dès à présent écouter le portrait radio consacré à Louis Dagorn…
Portrait – Rencontre avec Louis Dagorn