Claude Bossaire est éleveur de poules pondeuses hors-sol. Sa femme et lui sont tous deux exploitants, chose rare de nos jours relève Claude. Avant, tous deux vivaient en Vendée. Pendant 11 ans Claude a exercé en tant que conseiller de gestion. Quand sa femme décide de s’installer, il l’aide à retaper les bâtiments, alors en fin de course. Cinq ans plus tard, il s’installe à son tour. Chacun travaille sur son exploitation. La structure de sa femme, localisée à Saint-Yvi, compte 90 000 poules pondeuses. Lui avait tout d’abord un poulailler à Concarneau. Sous la pression des riverains, il a dû déplacer son poulailler et s’installer à Saint-Yvi. Il sera obligé de quitter la commune après qu’un nouveau lotissement ait été construit à côté du poulailler. Aujourd’hui, il élève 60 000 poulettes sur quatre étages à Ergué-Gabéric. 17 à 18 semaines plus tard, les poulettes rejoignent le poulailler de sa femme.
Il y a dix ans encore le prix de vente était supérieur au prix de revient. Aujourd’hui, le prix de revient excède le prix de vente qui ne fait que diminuer. Les gains de productivité ne permettent plus de combler ce manque à gagner. Les mises aux normes exigent des investissements colossaux pour restructurer les bâtiments. Les investissements se chiffrent en centaines de milliers d’euros, quand ce n’est pas en millions. « J’ai passé mon temps à construire et à défaire ce que j’ai fait. »
Chaque jour, ce sont 8 à 10 palettes chargées d’œufs qui quittent l’exploitation.
Cela semble énorme, pourtant, les gains ne sont pas nécessairement au rendez-vous : « […] on attaque le lundi, on va produire, mais on ne sait pas si on va gagner sa croûte. […] l’an passé un truc qu’on n’avait jamais vu dans notre carrière en plus de 25 ans, on a dû payer pour que les poules partent. C’est-à-dire que la viande non seulement était donnée mais en plus on devait payer pour vendre nos produits. Fin c’est un truc on n’a jamais vu ça. » Claude le reconnait, « c’est un système…c’est très très fragile. »
Contrairement à d’autres filières, l’élevage de poules pondeuses s’inscrit rarement dans le schéma habituel des coopératives agricoles. Claude traite ainsi directement avec une société privée qui lui livre les aliments et vient collecter les œufs. D’autre part, de par sa dimension et les aspects techniques que cela implique, sa structure et celle de sa femme diffèrent grandement des élevages plus petits et des autres filières de production. « C’est de l’élevage, mais c’est de l’élevage très mécanique. Et donc du coup faut avoir l’œil. D’habitude quand on a de l’élevage faut avoir l’œil sur les animaux, mais ici c’est l’œil sur la partie mécanique. Il faut détecter tout de suite dès qu’il y a un souci. Parce qu’autrement c’est vite des catastrophes. »
Sur la commune et dans les alentours, Claude Bossaire observe que l’élevage est en train de péricliter. Il y voit une volonté de supprimer toute activité d’élevage en zone littorale. Les élevages remontent dans les terres, et s’implantent à la périphérie de Quimper et des zones d’activités. La production laitière est particulièrement touchée. Claude constate que les agriculteurs sont obligés de travailler de plus en plus pour s’en sortir, sans pour autant toujours y parvenir. « Les gens hors agricole n’imaginent pas ce que font certains. Le travail que ça représente chez certains c’est de la folie. Et du coup c’est ça qui crée un gros souci par rapport au reste de la population, parce que les gens n’imaginent pas ce que c’est. »
Claude ne sait pas si ses enfants vont reprendre la suite. Il espère trouver un acquéreur, mais a déjà conscience que ce ne sera pas chose facile dans le contexte actuel.